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PHOTO SRC : Chicoine et Rufo à "La table d'à coté", Montréal, Qc 2007



Depuis toujours, Le monde est ailleurs s’est rendu disponible, dans la mesure du possible ou de ses intérêts, et dans l’exercice de ses différents champs de compétence, aux demandes de l’actualité ou de la chronique faites par les médias écrits et électroniques du Québec, du Canada et de l’Europe.


En raison notamment de l’expertise de Rémi Baril en gestion de projet dans le domaine des technologies de l’information et des communications, Le monde est ailleurs intervient également comme rédacteur, consultant ou concepteur pour les sites, les portails et les nouveaux développements autour des téléphones intelligents. De plus en plus, les membres de l'équipe sont également invités à travailler comme conseillers sur des productions télés, audios ou films, notamment dans le domaine du documentaire. À la section NOTRE MONDE, recherchistes, documentalistes, journalistes, chefs de projet ou de rédaction peuvent à cet effet trouver les coordonnées nécessaires pour rejoindre l’équipe et faire part de leurs offres et demandes.

 

 

SERVICEVIE DE TRANSCONTINENTAL / LE MONDE EST AILLEURS

Service Vie/ Coup de pouce

2008/2012

 

Recherche, écriture, production de centaines de textes pour le site WEB servicevie.com. Avec la participation de nombreux experts, rédacteurs et collaborateurs.

 

 

Extrait de la section INEDIT

Déficit visuel: Dalton et le daltonisme

2008

 

Par Jean Milot, M.D., ophtalmologiste, professeur émérite

Université de Montréal, Montréal, Québec, Canada

Avec Le monde est ailleurs

Dernière révision : 9 janvier 2008

 

Dalton s’expliquait son incapacité à distinguer le rouge du vert par l'humeur vitrée de ses yeux qu’il croyait teintée de bleu. À sa mort, l’autopsie de ses yeux révéla que ses humeurs vitrées étaient incolores. Mais cette dyschromatopsie, ou anomalie de la vision colorée, portera désormais son nom. Abusivement, toutes les formes de dyschromatopsie finiront d’ailleurs par s’appeler « daltonisme ».

 

C’est en octobre 1794 que John Dalton (1766-1844), physicien renommé, fondateur de la chimie moderne avec sa théorie atomiste, décrivit sa condition visuelle dans un travail qu'il présenta à la Manchester Literary and Philosophical Society. Il était conscient qu'il ne voyait pas les mêmes couleurs que les autres. Par conséquent, il exécrait à devoir assister à des réunions officielles à l'auditorium universitaire car il devait porter la toge de la couleur assortie à son rang dans l'échelle professorale. Passant par le vestiaire, il était incapable, parmi toutes les toges suspendues aux crochets, d’identifier celle qu’il devait enfiler et craignait d’être ridicule en le demander à ses collègues.

 

La nature du daltonisme

La forme la plus connue du daltonisme se manifeste par une perception déficiente du rouge et du vert, qui se confondent. En fait, ces deux couleurs demeurent distinctes aux yeux du daltonien car elles lui donnent des sensations différentes, par leur intensité respective. C'est par leur différence de clarté qu'il se fait une idée de ce qu'est le rouge et le vert.

 

Dans la rétine humaine, il existe trois types de cône dans les couches tissulaires sensibles à la lumière pour la perception des couleurs. Le premier type absorbe les longueurs d'onde de rouge, l'autre les longueurs d'onde de vert et le troisième est plus sensible aux longueurs d'onde de bleu. Un daltonien peut être aveugle du rouge  (protanopie), du vert (deutéranopie), du bleu (tritanopie) ou encore ne distinguer aucune couleur, que des teintes de gris : cette dernière condition, appelée « achromatopsie », est extrêmement rare. 

 

Le daltonisme est une maladie héréditaire à caractère récessif qui affecte beaucoup plus souvent les hommes (8%) que les femmes : le père transmet son anomalie à ses petits-fils par l'intermédiaire de ses filles, porteuses saines de son chromosome défectueux.

 

Charles Meryon, peintre daltonien

Charles Meryon naît à Paris en 1821 et meurt à Saint-Maurice, Val-de-Marne, en 1868,  à l'âge de 47 ans. Fils illégitime d'un médecin anglais vivant à Londres et d'une danseuse de l'Opéra de Paris, il fut le précurseur, malgré lui, de la coutume actuelle des gardes partagées : il passa son enfance entre Londres et Paris.  En 1837, âgé de 16 ans, il entra dans la marine et partit pour la Polynésie. Alors que les  mers du Sud étaient un prétexte à une profusion de peintures polychromes chez tous les peintres, Meryon, au cours de ses croisières, ne peignait qu'en noir et blanc. Le seul pastel connu de Meryon est le «Voiler dans la tempête» dans les tons préférés des daltoniens, où prédominent le jaune et le bleu, mettant en évidence l'absence de rouge et de vert.

 

Revenu à Paris en 1846, à l'âge de 25 ans, il se tourna vers la gravure. La conversion de Meryon de la peinture à la gravure semble s'être opérée sans drame moral.

 

SOURCES

 

Philippe Lanthony. Les yeux des Peintres. Éditions L'Age d'Homme, Lausanne, Suisse. 1999.         

Nicholas J. Wade. A Natural History of Vision. The MIT Press, Cambrige, Massachusetts.

 


Extrait de la section ÉDITORIALE

L'été et rien d'autre

2008

 

Par Bernard Voyer, aventurier

Avec Le monde est ailleurs

Dernière révision : janvier 2008

 

Vainqueur des plus hauts sommets des cinq continents, vainqueur des deux pôles, Bernard Voyer est célèbre pour ses aventures dans la neige. 

 

L’été laisse tomber quelques gouttes de pluie certes, mais il laisse également tomber les contraintes d’horaire, le stress, la noirceur et quelques vêtements, il est synonyme de liberté. En vacances ou pas, ça sent les vacances et l’insouciance qui accompagne cette période. Tout devient subitement plus simple ; une grillade au barbecue, un short, sandales et t-shirts et nous sommes prêts à recevoir. La nature s’est occupée des fleurs et des odeurs de verdure. Un napperon en papier fera l’affaire, après tout, c’est la rencontre des amis qui compte et pas le fla-fla. Les enfants mangent en vitesse, les règles de bonne conduite sont laissées derrière, ils ont droit à la détente. Tard, ils courent toujours, tard ils se coucheront, pas d’école demain. Peu de vaisselle à faire, les amis étirent le temps et les discussions s’allongent dans la nuit. La chaleur de midi est remplacée par la douceur de ces interminables soirées étoilées.

 

Le lendemain, une course à faire, le vélo s’impose, lier l’exercice, le bien-être et l’efficacité. Cheveux aux vents, les distances défilent dans un agréable sentiment de faire sa part pour l’environnement. L’été propose l’exercice, la mise en forme, le bronzage et le pas léger. Les couleurs nous entourent et nous enveloppent ; tissus fleuris, teintes fortes, même l’excès est permis. Cette liberté apportée par l’été se manifeste dans chacun de nos gestes, dans le regard que nous portons sur la vie.

 

L’aventure en canot

Notre coin du monde, le Québec, est une véritable éponge, il suffit de le survoler pour s’en convaincre. Terres humides et multitudes de lacs et de rivières. La meilleure façon de le découvrir, de le connaître et de l’apprécier est de le parcourir en canot, j’en suis convaincu. Partir à l’aventure même pour quelques jours, nous permet de toucher l’été dans un contact intime. D’aventure en aventure, l’horizon n’est que nature. Cette eau si précieuse et rare dans tant de pays, file sous le canot, limpide, pure, elle reflète le paysage.

 

J’entends Vigneault qui chante « J’ai pour toi un lac, un beau lac tout bleu… »

 

De nos jours, où peut-on boire l’eau directement du lac ? Chez nous, mais pour combien de temps. De lac en lac, notre itinéraire nous amène à contourner des presqu’îles, à longer des falaises, à traverser de grandes étendues pour retrouver l’île de notre projet, l’île de notre nuit. La tente installée sur la pointe, le feu de camp qui crépite, nous vivons un moment d’émerveillement pour ne pas dire de paix. Cela s’inscrit dans notre culture. Si la culture est faite de notre environnement et de notre passé, nous rejoignons ainsi l’histoire de nos ancêtres et celle des premières Nations.

 

La plénitude que procure l’isolement devient un silence instructif et réparateur. Il y a beaucoup de calme qui émane d’un simple regard sur l’eau. L’eau est un anti-stress par excellence, elle représente la stabilité, la durée, la continuité. Personne n’est insensible à sa puissance réconfortante. Pour ma part, c’est là, au bout de l’île, assis sur le rocher à regarder l’eau, que j’ai pris plusieurs des décisions les plus importantes de ma vie. C’est là, en regardant profondément en moi que j’ai trouvé des réponses à mes questions.

 

Je n’hésitais pas à plonger dans mes pensées pour y rejoindre l’amour, l’amitié, l’engagement et bien d’autres sentiments trop souvent camouflés. Lorsque la brise de fin d’après-midi se levait, elle remuait la surface de l’eau ainsi que mes pensées et quand le vent soufflait et la vague venait fracasser mon rocher, il en était de même pour mes certitudes, elles se confrontaient à vouloir s’éclater. En fait, l’eau donnait le rythme à mes réflexions. Le Lendemain, je repartais avec mon canot à la recherche d’un autre rocher, d’une autre île et de la même eau.

 

L’appel de la montagne

J’écris ces mots au pied des Rocheuses que j’ai connues il y a longtemps, le temps d’un été de mon adolescence. Les quelques mois de montagne ont donné du relief à mon existence, c’est le cas de le dire … !

 

Je les ai découvertes de nuit, descendant de train à Banff. Sous un ciel étoilé, elles se pointaient au-delà de ma réalité. Je ne pouvais croire qu’elles étaient si hautes, si grandes et j’ai du attendre le soleil levant pour voir qu’elles étaient merveilleuses. Ce fut un été très particulier, mon été. J’ai du apprendre à approcher les cimes avec respect et modestie. Tout en bas, la vallée s’allongeait, sa rivière la suivait dans une verdure indescriptible. Je savais que l’ours partageait le même endroit que j’empruntais, je savais que je serais à bout de souffle à parcourir ces falaises et je me doutais bien que cela allait orienter ma vie.

 

Ce fut l’été tant espéré et il est encore aujourd’hui celui qui soutient mes projets, celui qui porte le plus grand nombre de souvenirs précieux, celui qui m’a poussé vers la peur et l’émerveillement. Un été de rêve et de réalité.

 

À relire ces lignes, je me surprends à penser, est-ce vraiment moi qui ai écrit ces mots si doux, si tendres pour cette saison que je considère trop souvent comme un simple entracte dans le grand et majestueux spectacle de l’hiver ?


 

AGENCE INTERGOUVERNEMENTALE DE LA FRANCOPHONIE SUR AAA/ LE MONDE EST AILLEURS

Agence Intergouvernementale de la francophonie

2003

 

Un projet WEB de Rémi Baril & Jean-Francois Chicoine sur Abandon, adoption, autres mondes. Avec la participation de nombreux experts, rédacteurs et collaborateurs.

 

 

Extrait TERRES D'ABANDON

Les orphelinats sont plein de garcons

2003

 

Par Hind Belarbi, étudiante en sociologie

Avec Le monde est ailleurs

Source : Terres d’abandon sur Abandon, adoption, autres mondes à www.meanomadis.com

Québec 2003

 

 

Photo LMEA/Hind Belarbi Dortoir à l'orphelinat, Maroc 2003

 

 

Il n’y a pas plus belle offrande du ciel que celle d’avoir un enfant. Malheureusement, de bonnes conditions ne sont pas toujours réunies pour offrir à celui-ci un milieu sain.

 

Parmi les problèmes sociaux majeurs dont souffre le Maroc, nous distinguons celui relatif à l’abandon des enfants. La juridiction marocaine reconnaît d’ailleurs leur statut depuis 1993. Ces enfants sont considérés comme abandonnés quand ils ont moins de 18 ans, sont orphelins, seuls ou sans parents connus ou encore quand leurs parents sont dans l’incapacité de les prendre en charge pour des raisons physique, mentale ou morale. Lorsqu’un enfant est trouvé, une enquête est menée par les autorités policières pour voir s’il y a lieu ou non d’établir un jugement d’abandon. Au cours de l’enquête, l’enfant est recueilli de manière provisoire par une institution spécialisée et si le jugement est prononcé l’enfant intègre celle-ci qui s’en occupe. Ces enfants représentent dans les orphelinats environ 80 % de la totalité des enfants qui y sont pris en charge.

 

Selon les statistiques de l’ONDE (observatoire national des droits de l’enfant), sur 100 enfants abandonnés, 50 trouvent des familles d’accueil, 6 sont repris par leur mère, 8 restent dans les institutions et 36 meurent (près de 66 % meurent avant l’âge de trois mois pour des raisons de santé).

 

Le Maroc bute contre ce problème depuis bien des années. Les raisons de cette situation sont multiples : pauvreté, analphabétisme ou encore valeurs religieuses. La pauvreté en effet tue les bons sentiments et pousse certaines personnes à abandonner leurs enfants faute de moyens. Le manque d’éducation quant à lui implique entre autres une méconnaissance des moyens de contraception. Concernant les valeurs religieuses, il faut savoir que la procréation hors des liens du mariage est considérée au Maroc, comme dans tout pays musulman, comme une transgression à la religion. La plupart des enfants abandonnés le sont justement par des filles mères. Ces mères célibataires sont généralement rejetées par la société marocaine et leurs enfants restent un peu les enfants de la honte. Ils sont d’ailleurs considérés par certains comme les enfants du péché et porteurs de péchés.

 

Les orphelinats accueillent donc ces enfants et il s’avère qu’au moment de l’adoption, les familles d’accueil penchent plus pour l’adoption d’une fille que d’un garçon. Madame Khadija Darid, rédactrice en chef du magazine Femmes arabes, nous confirme par ailleurs que les orphelinats sont effectivement pleins de petits garçons et que les petites filles restantes sont généralement en mauvaise santé. Certaines familles suivent encore le modèle familial traditionnel selon lequel l’éducation de la fille comporte moins de risques que celle du garçon. À leurs yeux, la fille cause moins de problèmes dans la mesure où, par exemple, son échec scolaire n’est pas aussi important que celui du garçon qui lui, est destiné à assurer le rôle de chef de famille par la suite. Toutes ces croyances sont bien entendu dictées par des coutumes ancestrales qui confinaient la femme au rôle de ménagère. Toutefois, celles-ci existeraient toujours dans plusieurs milieux familiaux. En parallèle à ces constatations, l’adoption de fillettes pour en faire des domestiques est malheureusement aussi une pratique courante. Ces petites filles sont alors exploitées par leur famille adoptive et subissent parfois des violences physiques. Certains orphelinats participent à cette logique d’adoption jugeant que le sort de l’enfant sera peut-être meilleur que celui qu’il aurait connu dans leur institution !

 

Le Maroc connaît donc aujourd’hui de sérieux problèmes liés d’une part à l’abandon des enfants, et d’autre part, au sort qui les attend. Bien que reçus par des institutions d’accueil, la plupart d’entre eux finissent dans les rues et vivent dans des conditions misérables. Il faut savoir également qu’au-delà de la dimension économique qui est très précaire dans certains orphelinats, la dimension psychoaffective est quasi inexistante. Ces enfants, en plus de ne pas bénéficier d’un environnement sain (nourriture, vêtements, soins médicaux…), sont la plupart du temps en manque de tendresse et d’affection.

 

Il ne s’agit donc pas seulement de prendre en charge les besoins de l’enfant, mais également de lui procurer certains gestes afin de sauvegarder son équilibre affectif et sa confiance en soi. Précisons à cet égard qu’en Islam, une simple caresse sur la tête d’un enfant orphelin est considérée comme un grand acte de vertu.

                                                                                               

SOURCES

 

Portail dédié à la femme marocaine, Lamarocaine.com : Plus de garçons abandonnés que de filles

Maroc Hebdo Internationale numéro 538 : La Croix et la bannière par Abdelali Darif Alaoui

Entretien avec Khadija Darid, Rédactrice en chef du magazine Femmes arabes (Arabiat)

Démocratie et Droits de l’Homme, Ambassade des États-Unis au Maroc :

Rapport du département d’État américain sur la situation des droits de l’homme au Maroc en 1998

 

 

Extrait BIBLIOTHÈQUE DES ENFANTS PERDUS

Johnny le chanteur abandonné

2003

 

Par Marie Desjardins, écrivaine, journaliste et biographe

Le monde est ailleurs

Source : Abandon, adoption, autres mondes à www.meanomadis.com

Québec, 2003

 

Johnny Hallyday, le «Chanteur abandonné ». C’est sa chanson fétiche, mais aussi l’histoire de cet enfant conçu à Paris, un soir d’octobre, dans un logis humide et résonnant des sirènes sinistres des couvre-feux de la Deuxième guerre mondiale. Une femme et un homme se sont rapprochés sous une couverture. Johnny est né de leur besoin d’exister. Un matin, le père s’enfuit sans un mot d’explication. Un artiste, un souffrant. Au début sa mère affronte l’épreuve avec le courage qui est donné aux femmes qui ont enfanté. Mais, quelque temps plus tard, les circonstances ont raison de sa meilleure volonté. Johnny est confié à une parente artiste. Du jour au lendemain – à cet âge où l'on subit à défaut de pouvoir choisir – Johnny est acculé à un destin de prodige.

 

À six ans, il est à Londres et joue dans une pièce de théâtre, incarnant un petit négrillon au service de bien plus grand que lui. En quoi veut-on qu’il se déguise ? En momie, en cow-boy, en lutin ? Si cela doit le conduire sur les planches dont il rêve déjà, il le fera.

 

Le jour où, finalement, il revit sa mère, il ne la reconnut pas. Pourtant, elle rappela des souvenirs, le serra longuement dans ses bras. Johnny reconnut peut-être vaguement son odeur, sa peau, mais il resta insensible à ses larmes. Pas question de perdre une deuxième fois celle qui revenait le hanter dans ses rêves et l’envahir d’une chaleur que ni sa tante, ni ses cousines n’avaient réussi, malgré tout leur amour, à lui transmettre. Johnny avait appris à vivre sans cette chaleur-là.

 

Parcourant l’Europe avec sa tante et ses cousines, grelottant d’une ville à l’autre, il mangea de la vache enragée et s’amusa franchement aussi. À douze ans, il souffrit d’être gros, de zozoter après s’être brûlé la langue, de ne pas avoir de copains. Malgré son amour et ses soins, il perdit toutes les bêtes auxquelles il s’attacha et connut les sentiments mêlés de se sentir fier et honteux de sa condition de saltimbanque, de faux orphelin, de curiosité sociale — enfant sauvage domestiqué, bête de cirque en liberté.

 

Johnny n’avait ni frère ni soeur, ni cousin ni ami, ni père ni mère. Sa tante et son oncle lui tenaient lieu de parents. Le mari de sa cousine, un artiste américain, lui servait de modèle. Le public et les gens du spectacle lui donnaient l’illusion d’une grande famille. Johnny était entouré, mais seul. Il en souffrit pendant des années, surtout quand on le traitait de bâtard. À quinze ans, il adopta un bistro et là, entre un pin-ball et un babyfoot, il devint une sorte de roi parce qu’il avait toujours été seul ou presque, et qu’il allait au bout de souffrances qui avaient l’air de passions.

 

La première fois qu’il monta sur la scène de l’Alhambra, ce fut une catastrophe.

 

-Johnny ! À la douche ! À l’asile !

 

Aux premiers rangs, il vit des gens se parler à l’oreille, rire et lui cracher des injures. D’autres quittèrent précipitamment la salle. Johnny, dix-sept ans, continua de chanter. De retour chez lui, dans sa petite chambre couverte de photos d’Elvis et de James Dean, il pleura sans que sa tante et ses cousines ne parviennent à le consoler. Cependant, dans son quartier, à la Trinité, au Golf Drouot, au Snack spot de la rue Saint-Lazare, Johnny avait son rôle à tenir. Ce n’était pas tant s’imposer qui comptait : c’était s’imposer lui — sortir d’Elvis et de James Dean qui couvraient entièrement son être tout comme ils l’aidaient à survivre, et à espérer. Des rêves – son monde depuis qu’il avait été largué, puis hissé à bord d’un navire voguant de par le monde sous la gouverne de ces femmes-marins — ses mères.

 

Dans six mois, au-delà des insultes et du mépris, Johnny deviendrait une vedette. En attendant, il prenait des forces. Car après s’être imposé, il lui faudrait durer, et surtout vivre avec cette blessure qui ne disparaît jamais pour qui sait vraiment ce que veut dire le petit mot de trois syllabes – abandon – et son compagnon de fortune : adoption...

 

 

MAGAZINE RICARDO/ LE MONDE EST AILLEURS

Ricardo

2003-2014

 

 

Extrait RICARDO

Nunan ’s Lobster Hut, Chauncey Creek Lobster Pier & cie: Maine, famille et crustacés

2003

 

Par Jean-François Chicoine, pédiatre

Adapté de Le Maine, paru dans Ricardo

Qc, 2003

 

 

 

 

Photo LMEA Chauncey Creek Maine, États-Unis 2003

 

Les gens du Maine sont si gentils (…) Les gens du Maine sont si gentils (…) Non, mais vous m’écoutez? J’ai écrit : « Les gens du Maine sont si gentils ». C’est faux! On a déjà vu plus gentil, plus souriant, plus couche-tard et moins puritain. Mais, il faut le reconnaître, les gens du Maine savent faire cuire les décapodes. C’est ça le Maine, des gens qui savent si bien servir le homard qu’ils vous accueillent comme des crustacés.

 

Dans le genre, la meilleure adresse au monde pour la bête — et croyez-moi, ma femme, mes amis et moi, on en a fait assassiner des centaines - c’est au Nunan ’s Lobster Hut, à environ deux kilomètres au nord de Kennebunkport sur la route 9 en direction du quai de Cape Porpoise.

 

La vraie affaire

Ce n’est pas une aubaine, mais c’est exactement la « vraie affaire ». L’ambiance d’abord : les planches grises reluisantes du plancher, les murs de la cabane ou les cartes professionnelles des jeunes avocats de Ville Mont-Royal côtoient celles des amis texans des Bush dont la maison familiale n’est vraiment pas très loin. Avec un peu de malchance, vous risquez même de les rencontrer.

 

En entrée, prévoyez quelques clams, un peu sablonneuses hors-saison, mais tout aussi savoureuses-en passant, des clams qu’on devrait nommer « mies » en bon français. Vous attaquez ensuite le ou les homards. Ils sont servis avec des chips, deux tranches de cornichon et un petit pain au lait. Nul, mais c’est la façon de faire.

 

Au dessert, il ne faut surtout pas rater la seule décadence publiquement acceptable de la côte : le brownie deluxe, un vrai brownie avec du fudge et de la crème fouettée et de la crème glacée, le kit complet et inoubliable. Cartes de crédit refusées, question de respecter la sympathique tradition d’accueil.

 

Autour de là

À Kennebunk, vous pourriez aussi dénicher un bon repas au Kennebunk Inn qui possède aussi l’une des rares terrasses pour l’apéro. Au typique Cape Arundel Inn, en bordure de mer, vous trouverez une cuisine poussive, bourgeoise, mais une vue superbe sur l’océan avec en bonus pour les masos parmi nous : un œil impayable sur le Bush Estate. Au Arundel Wharf Restaurant, plus central, même bémol pour la nourriture, gratinée ou trop cuite, mais un site impayable s’ouvrant sur un deck généreux entre les bateaux.

 

L’adresse locale qui rallie tous les suffrages est le Hurricane, transfuge d‘Ogunquit, alors lové au cœur du petit port de Perkins Cove. L’endroit est toujours au bord de l’eau et la vue, sur le port. On y mange bien, même très bien, une cuisine américaine inspirée qui sait particulièrement bien apprêter les poissons, dont le thon, rouge et piqué de poivre ou de pacanes selon l’inspiration du chef. Le resto a l’avantage de fermer à des heures relativement plus tardives. Au dessert, il y a de la vraie bonne Key lime pie. N’importe qui peut faire un bon soufflé, mais il faut s’y prendre de bonne heure pour réussir comme il faut cette symbiose ultime du gras et de la limette. La meilleure dans le genre est celle du Joe’s Stones Crab floridien, mais celle-ci est décidément sa proche cousine.

 

Le bel endroit sur la mer

Les tenants de Kennebunk vous diront que votre virée côtière devrait s’arrêter là. Mais ce serait faire disgrâce aux pros d‘Ogunquit –« a beautiful place by the sea »- qui ont des atouts de taille, à commencer par la plage d’Ogunquit, splendide et glacée. Le midi à Perkins Cove, je vous recommande le Lobster Shack, une petite entreprise familiale qui fait le seafood showder et les crab rolls à la perfection. Drôle à dire, la coleslaw de brocolis y est également impeccable.

 

York et York

Évidemment, quand vous vous déplacez vers York, vous empruntez la petite route de la Côte, magnifique, qui serpente entre les villas et les rochers.  Puis, vous arrivez à York pour constater, comme des milliers d’autres avant vous, qu’il y a York et York. À York Village tout d‘abord, vous trouverez un magasin old fashioned qui fait son saltwater taffy en vitrine : le Goldenrod qui date de 1896.Si vous êtes braves, on y sert un curieux club sandwich au steak haché, ou si vous préférez, un hamburger façon club sandwich.

 

Un peu plus loin, vous trouvez York Beach, que vous atteindrez par un petit détour au phare étoilé Michelin de Cape Neddick. Là habite le dieu de la crème en glace : chez Brown’s Old Fashioned Ice Cream. Onctueuse, baveuse, elle est parfaite. C’est même une des préférées de Ben, de Ben & Jerry’s. Profitez- en pour attaquer une rareté : le parfum Indian Pudding, avec de la muscade en masse.

 

La crique

Du Maine au New Hampshire vous traversez les outlets de Kittery qui est aussi, il faut le rappeler aux magasineurs, un charmant petit village. Avant d’y arriver, vous trouverez sur la Chauncey Creek Road, un des endroits les plus bucoliques et les plus curieux qui soient : le Chauncey Creek Lobster Pier. En bordure d’une rivière, cet établissement moitié aire de pique-nique moitié resto vous donne le droit d’arriver en famille avec votre glacière, vos salades, vos boissons et se charge de vous vendre un excellent homard. Je vous jure, si vous avez le courage de trouver la crique, l’expérience est inoubliable. Dans le genre, et ça reste extrêmement rudimentaire qu’on se comprenne bien, c’est un des lieux les plus sympathiques du Maine. Rien de moins. Ouvert tous les jours de 11 heures à 19 heures.

 

En ville

Les principales destinations du sud du Maine sont à une vingtaine de minutes de Portsmouth, New Hampshire, un petit kilométrage qui constitue, les soirs d‘été, une bien belle ballade. Avant d’y arriver, sur la petite route qui mène de Kittery à Strawberry Banke, vous croisez le Warren’s Lobster House, un endroit assez comique ou on mange assez ordinaire, mais en bordure de rivière, avec au menu un bar à salade qui épatera vos amis soixante-huitards en excursion. À Portsmouth, vous mangerez très bien une cuisine américano-méditerranéenne au Lindergh’s Crossing. Le bistro du deuxième avec vue sur le port est vraiment très agréable, déjà un peu bostonien dans l’éclairage et le ton.

 

Et enfin - c’est le pédiatre qui parle- une recommandation pour toute la famille. Elle n’est pas triste. Dans un centre d’achat en banlieue de Portsmouth, à Newington, sur la route qui vous ramène déjà sur Montréal, vous trouverez, non seulement des cinémas, des magasins et une méga librairie, mais aussi les Rocheuses, comme vous ne les avez jamais vues, au Bugaboo Creek Steak House, un resto, voire une patente thématique avec orignaux mécanisés et poissons disneyiens, qui fera le bonheur des enfants et des amateurs de grosses portions. L’endroit qui s’affiche comme étant «  the flavor of Canadian Rockies » est d’un kitch redoutable. Un resto de la même chaine, identique pour tout dire, existe aussi plus au nord, dans le splendide Portland.

 

En conserve

Un peu plus loin, tout près de Concord, l’arrêt tendance depuis quelques années s’impose au Target, une sorte de Walmart revisé à la manière de Martha Stewart. On y trouve de la vaisselle surprenante ainsi que bien des cochonneries, et parfois des vraies bonnes. J’y ai acheté dernièrement une conserve de Maine’s Clam Chowder du cuisinier californien Wolfgang Puck. Délicieux… et sécurisant : le Maine, en conserve, et à longueur d’année.

 

 

 

Photo LMEA: La découverte du homard, Maine, États-Unis 2011

 

 

CARNET DE BORD

 

Nunan’s Lobster Hut, Route 9, Cape Porpoise (207) 967-4362

Cape Arundel Inn, 208 Ocean Avenue, Kennebunkport (207) 967-2125

Arundel Wharf Restaurant, 43 Ocean Avenue, Kennebunkport (207) 967-3444

Hurricane, Dock Square, Kennebunkport (207) 967-9111

The Lobster Shack, Perkins Cove (207) 646-2941

The Goldenrod, Short Sands Beach, York Beach (207) 363-2621/ thegoldenrod.com

Brown’s Old Fashioned Ice Cream, York Beach, (207) 363-1277

Warren’s Lobster House, 11 Water Street, Kittery (207) 439-1630

Lindbergh’s Crossing, 29 Ceres Street, Portsmouth, NH (603) 431-0887

Bugaboo Creek Steak House, 2024 Woodbury Avenue, Newington, NH (603) 422-0921/bugaboocreeksteakhouse.com

Target, 80 Damante Dr., Concord, NH (603) 227-0809 / target.com

Chauncey Creek Lobster Pier, Chauncey Creek Road, Kittery Point (207) 439-1030

Le resto le plus familial du monde! Avec ses tables de pique-nique jonchées de cole slaw et de cadavres de décapodes, admirablement installé sur le bord d’une crique à la tranquillité spectaculaire, dans un bout de pays ou j’ai nourri mes plus beaux moments d’amitié et d’amour, le Chauncey est le rendez-vous parfait des petits québécois et qui ont su assumer leur américanité. Vous apportez vos fromages, votre vin, vos desserts et tout le tralala et ils vous servent des livres de homard que vous faites craquer ensemble. Parait que les bêtes ne souffrent pas. Polar suggéré.

 

SOURCE

 

Chicoine, Jean-François, Le Maine, Ricardo, Gesca, 2003

 

 

 

Archives Radio-Canada Jean-Francois chicoine À Plus on est de fous, plus on lit, SRC 2015

 

 

 

 

Archives LMEA Magazine Santé, octobre 1990

 

 

 

 

Dernière révision: juillet 2015

 

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